Les deux annexions de l’Alsace-Moselle : 1871 et 1940 (3/14)

La particularité de l’arrondissement de Briey


Avant la signature du Traité de Francfort, l’arrondissement de Briey faisait partie du département de la Moselle.
Les arrondissements de Château-Salins et de Sarrebourg, en partie francophones, dépendaient du département de la Meurthe.
Le minerai de fer, exploité bien avant 1870 à cause de son importante teneur en phosphore, était peu rentable. Les arrondissements de Château-Salins et de Sarrebourg présentaient un intérêt économique certain dans le domaine agricole et des forêts, mais aussi par leur proximité de Strasbourg, ville que le peuple allemand convoitait depuis longtemps. Le rattachement de Strasbourg à la France par Louis XIV, sans coup férir et sans demander l’avis de personne, a été très mal vécu en Allemagne. Quant à la ville de Metz, elle n’a été convoitée que depuis peu : elle était considérée comme une ville de garnison ayant un intérêt stratégique, l’intérêt économique et culturel étant relégué au second plan.
Si Bismarck avait su que le procédé Thomas et Gilchrist allait permettre quelques années plus tard de tirer l’acier de la fonte phosphoreuse et donnerait ainsi un développement extraordinaire à l’industrie sidérurgique lorraine, aurait-il gardé l’arrondissement de Briey, en laissant à la France les arrondissements de Sarrebourg et de Château-Salins ? Il n’est pas exclu qu’il aurait conservé le tout.
Cet arrondissement de Briey, francophone, posait un problème sur le plan géographique. Le rattacher au département de la Meurthe éloignait Longwy, situé à l’extrême nord-est de près de 130 kilomètres de Nancy, chef-lieu et de près de 150 kilomètres de Badonviller et de Baccarat, extrême sud. Longwy aurait eu seulement trois fois la visite d’un préfet de Nancy en 40 ans. A un moment donné, il fut question de faire de l’arrondissement de Briey avec une partie du nord de la Meuse un nouveau département dénommé département de la Chiers, du nom de la rivière traversant Longwy et Longuyon pour se jeter dans la Meuse dans les Ardennes.
Pourquoi pas ? Le Territoire de Belfort, n’est-il pas devenu un département français ?
Finalement l’arrondissement de Briey a été rattaché au département de la Meurthe pour devenir le département de Meurthe-et-Moselle.

Ceux qui ont opté pour la France


Au total le chiffre des options s’élève finalement en Alsace-Lorraine à 160 878 et en France à 388 150, ces dernières toutes enregistrées dans le Bulletin des Lois (4).
Les premières statistiques fiables sont celles établies en 1901, année où la population de la France s’élève à 38 964 035 habitants, sur lesquels on compte 195 059 Alsaciens-Lorrains ayant effectivement changé de domicile avant le premier octobre 1872.
C’est Paris et les départements de la Seine-Inférieure, Seine-et-Marne, Seine-et-Oise qui ont accueilli la moitié des émigrés.
Viennent ensuite par ordre décroissant :
La Meurthe-et-Moselle, les Vosges, la Marne, le Territoire de Belfort et la Meuse. Tous les autres départements ont aussi accueilli des Alsaciens-Lorrains, mais dans une très faible proportion.

Ceux qui sont allés à Nancy


Si Paris et la région parisienne ont connu une immigration massive d’Alsaciens-Lorrains à partir de 1871, c’est Nancy qui a connu l’immigration la plus importante.
La population de la ville de Nancy a pratiquement doublé entre 1872 et 1901 passant de 53 000 et 103 000 habitants.
Nancy devient un centre intellectuel de premier ordre, siège d’une grande université de province, un foyer industriel où s’implantèrent beaucoup d’industries nouvelles.
Si Nancy a vu l’arrivée de beaucoup de Messins et de Strasbourgeois, elle a connu peu d’immigrants originaires de Mulhouse. Ces derniers, compte tenu de sa proximité, se sont installés à Belfort.
La Meurthe-et-Moselle, nouvellement créée, est le département qui a connu le plus d’immigrés alsaciens-lorrains et pas seulement à Nancy.
Les agriculteurs des territoires de langue française de la Moselle annexée, notamment ceux de la région de Metz, s’ils en avaient les moyens, ont acheté des terres en Meurthe-et-Moselle et dans la Meuse, en attendant de vendre celles dont ils étaient propriétaires en Moselle. Comme à cette époque commença le dépeuplement des campagnes au profit des villes et des centres industriels, par suite du développement de l’industrie sidérurgique et minière, de la construction des chemins de fer et de celle des cités ouvrières, les terres abandonnées par les partants se négociaient à des prix très abordables.
Les ouvriers des forges, des aciéries et fonderies de Hayange, de la vallée de la Fensch et du territoire allant jusqu’au Luxembourg, passaient la frontière pour se fixer dans l’arrondissement de Briey qui a bénéficié de l’apport de Villerupt et quelques villages d’alentour.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *